Mar, 29 avril 2025
Le décès du travailleur met fin aux rapports de travail (art. 338 al. 1 CO). L'employeur doit toutefois verser « le salaire » pour un mois supplémentaire et, après cinq ans de service, pour deux mois supplémentaires à compter du jour du décès, si le travailleur laisse son conjoint, son partenaire enregistré ou ses enfants mineurs ou, à défaut, d'autres personnes en faveur desquelles il remplissait une obligation d'entretien (art. 338 al. 2 CO).
Même si la loi parle effectivement de salaire, il ne s’agit pas d’un salaire déterminant AVS à proprement parlé, mais bien plutôt d’une indemnité pour les survivants expressément prévus par la loi.
Un droit au « salaire » post-mortem naît dans les conditions suivantes :
Il n'y a pas de droit si, au moment du décès, le contrat de travail a déjà été conclu mais que la personne n’est pas encore entrée en fonction.
En revanche, le fait que le collaborateur était encore en période d'essai au moment du décès, que le contrat de travail était limité dans le temps, qu'un licenciement avait été prononcé ne jouent aucun rôle dans le droit de percevoir ce « salaire ». Il en va de même si le collaborateur décédé ne percevait déjà plus de salaire avant son décès parce que le droit au maintien du salaire était épuisé. Le seul élément déterminant pour le droit au salaire post-mortem est que le contrat de travail était encore en vigueur au moment du décès.
Si les conditions prévues par la loi sont remplies, « le salaire » doit être versé pendant deux mois au maximum, à compter du jour du décès. La période entre le jour du décès et la fin du mois ne devant pas être prise en compte.
La loi divise les ayants droit en deux catégories. En premier lieu, le conjoint, le partenaire enregistré ou les enfants mineurs du collaborateur décédé (première catégorie).
L'éligibilité de ces personnes ne dépend pas du fait que le défunt était ou non tenu de leur fournir des prestations financières. Pour cette première catégorie, le salaire est dû en vertu du lien familial qui lie les ayants droit au défunt.
En deuxième lieu, les personnes en faveur desquelles le défunt remplissait une obligation d’entretien (deuxième catégorie).
Il est à noter que le divorce fait perdre aux conjoints leur statut. Dans un tel cas, l’ex-conjoint peut alors tout au plus avoir droit au « salaire » post-mortem à titre subsidiaire, s’il rentre dans la deuxième catégorie. En effet, le salaire est alors dû en vertu d’une éventuelle obligation d’entretien dont le défunt était tenu envers l’ayant droit.
Réponse : Le collaborateur décédé laissant une fille mineure (première catégorie), le droit au « salaire » post-mortem lui revient intégralement. L'épouse divorcée, elle, n'a aucun droit, même si celle-ci était au bénéfice d’un entretien de la part du défunt. La première catégorie prime sur la deuxième et exclut le droit de cette dernière.
La part du « salaire » post-mortem sert exclusivement à assurer l'entretien de l'enfant mineur pendant une période transitoire limitée et ne doit pas être utilisée à d'autres fins (cf. art. 318 ss. CC). Le versement de la part du « salaire » post-mortem de la fille mineure doit en principe être effectué sur le compte indiqué par la mère de l'enfant (en tant que titulaire de l'autorité parentale). Si l'employeur doute que l'ex-épouse, en tant que détentrice de l'autorité parentale, utilise l'argent à bon escient ou le dilapide plutôt à des fins personnelles, il devrait interpeller l'autorité de protection de l'enfant et de l'adulte.
S'il n'y a pas d'ayants droit dans la première catégorie, ce sont les personnes envers lesquelles le collaborateur a effectivement rempli une obligation d'entretien ou d'assistance qui entrent en ligne de compte (deuxième catégorie). L'obligation d'entretien assumée par le collaborateur décédé peut être de nature légale, contractuelle voire morale selon certains auteurs (mais cela est controversé). Selon ces auteurs, il n'est pas nécessaire qu'un tribunal ait établi cette obligation. Une obligation d'assistance morale peut être décrite comme une obligation que la société s'attend à voir respectée conformément aux valeurs en vigueur.
Il faut cependant toujours qu'il y ait eu une obligation de prestation d'une certaine nature, au moins d'ordre moral. Le seul fait d'apporter un soutien, par exemple par générosité, ne justifie pas un droit au « salaire » post-mortem selon l'art. 338 CO. Pour des motifs de sécurité juridique, nous sommes cependant d’avis, à l’instar d’autres auteurs, que seules les personnes au bénéfice d’une obligation légale d’entretien au sens du Code civil (art. 328 CC) peuvent prétendre à l’indemnité. Le cas le plus courant étant celui des enfants majeurs en formations.
Réponse : Si le collaborateur décédé a exercé son devoir d'assistance envers sa mère, celle-ci fait partie des ayants droit au sein de la deuxième catégorie. Elle a donc droit au versement de ce « salaire ».
La loi ne précise pas comment procéder au partage lorsqu'il y a plusieurs ayants droit au sein de la première ou de la deuxième catégorie.
La doctrine n'est notamment pas d'accord sur la question de savoir s'il existe un ordre de priorité au sein d’une même catégorie : une partie de la doctrine part du principe qu'il existe un ordre de priorité entre les époux ou les partenaires enregistrés et les enfants mineurs. Cela aurait pour conséquence que les enfants ne seraient ayants droit que dans la mesure où il n'y a pas de conjoint ou de partenaire enregistré(e). Les tribunaux n'ont, à notre connaissance, pas encore tranché cette question. A notre avis, étant donné qu'il n'existe pas de base légale claire pour un ordre de priorité et que, selon la formulation de la loi, la subsidiarité se réfère à la relation entre les deux catégories, tant le conjoint que les enfants mineurs sont des ayants droit. Il faut donc partir du principe qu'en présence de plusieurs ayants droit au sein de la même catégorie (première ou deuxième catégorie), le droit au « salaire » post-mortem doit être partagé par tête à parts égales.
Réponse : Dans le cas présent, l'épouse et la fille sont toutes deux des ayants droit à parts égales. Le versement de la part de salaire de la fille mineure doit en principe être effectué sur le compte indiqué par la mère, en tant que titulaire de l'autorité parentale (voir explications ci-dessus).
La personne qui fait valoir un droit au « salaire » post-mortem doit prouver que les conditions d'octroi sont remplies, à savoir démontrer son statut ainsi que la part à laquelle elle peut prétendre. Cela correspond à la règle générale du fardeau de la preuve selon l'article 8 du Code civil, selon laquelle c'est à celui qui déduit d’un fait l’existence de droits de le prouver. Il s'ensuit, selon notre avis, qu'il ne peut pas incomber à l'employeur de procéder aux vérifications nécessaires afin de déterminer les ayants droit.
Il est toutefois conseillé à l'employeur de faire preuve de prudence, en particulier lorsqu'il n'y a pas de personnes de la première catégorie et que la situation n'est pas très claire. Il devrait ainsi toujours requérir les documents de preuve nécessaires, par exemple, le jugement de divorce, s’il s’agit du droit à l'entretien après le mariage de l'époux divorcé vis-à-vis de l'époux décédé.
En cas de litige, le demandeur devra apporter la preuve devant le tribunal que les conditions d'octroi sont remplies.
Non, le « salaire » post-mortem doit être versé sur un compte bancaire désigné par l'ayant droit.
Motif : contrairement aux droits du collaborateur décédé, qui existaient déjà au moment de son décès mais n'ont pas encore été exercés, le droit au « salaire » après le décès est directement opposable à l'employeur par les ayants droit en vertu l'article 112 CO.
Ce droit au « salaire » post-mortem ne fait pas partie de la succession et n’entre donc pas dans la masse successorale. Le droit au « salaire » post-mortem revient donc à un ayant droit selon l'art. 338 al. 2 CO, même si celui-ci a répudié la succession. C'est pourquoi un employeur qui verse le salaire post-mortem sur le compte bancaire du collaborateur décédé ne remplit en principe pas son obligation légale car le « salaire » post-mortem tomberait ainsi dans la masse successorale.
Rappel : le salaire jusqu'à la date du décès (y compris un éventuel 13e salaire calculé au prorata), les gratifications, les allocations et les suppléments, le remboursement des frais, etc. sont des droits découlant du rapport de travail : dans la mesure où ils ne sont pas de nature strictement personnelle, ils doivent être versés sur le compte bancaire du collaborateur décédé. Contrairement au « salaire » post-mortem, les droits découlant du rapport de travail tombent eux dans la masse successorale.
Le décès du collaborateur met fin aux rapports de travail. Comme toutes les créances découlant des rapports de travail deviennent exigibles à la fin des rapports de travail (art. 339 CO), l'exigibilité du « salaire » post-mortem intervient au décès du collaborateur. Si le « salaire » post-mortem comprend l’équivalent de deux mois de salaire, ce montant devient exigible en même temps, soit au jour du décès.
Bien que le droit au « salaire » post-mortem ne soit pas un droit au salaire à proprement parler, la doctrine est majoritairement d'avis qu’il se prescrit par cinq ans à compter du jour du décès, conformément à l'art. 128 ch. 3 CO.
Le calcul se fait selon les mêmes règles que pour le droit au maintien du salaire selon l'art. 324a CO. Ainsi, il faut notamment prendre en compte les éléments de salaire tels que le 13e mois de salaire, les commissions, le salaire en nature, ainsi que les indemnités versées régulièrement telles que les indemnités pour travail de nuit ou du dimanche. En revanche, les frais forfaitaires réels ne doivent pas être pris en compte.
Comme le « salaire » post-mortem ne constitue pas à proprement parler un revenu de l'activité lucrative, il n’est pas soumis à l'AVS et aucune cotisation aux assurances sociales ne doit être prélevée (art. 8 let. c RAVS). Le « salaire » brut est donc versé sans aucune déduction.
Les survivants ayants droit doivent déclarer le « salaire » post-mortem dans leur déclaration d'impôt en même temps que les autres revenus. L'employeur doit donc établir un certificat de salaire séparé pour la personne bénéficiaire, dans lequel le montant est indiqué sous chiffre 4 (prestations en capital). La période de salaire à indiquer est le mois au cours duquel le « salaire » post-mortem a été versé. Un certificat de salaire distinct doit être rempli pour chaque ayant droit individuel.
Cette disposition fait partie des dispositions dites relativement impératives selon l'art. 362 CO. Il n'est donc possible de déroger à l'art. 338 CO qu'en faveur du collaborateur. Il serait donc possible de prévoir contractuellement une augmentation du montant du salaire (p. ex. l’équivalent de trois mois de salaire au lieu des deux mois légaux après cinq ans de service), une extension du cercle des ayants droit ou une réduction du nombre des années de services donnant droit au versement du « salaire » (p. ex. droit au versement de l’équivalent de deux mois de salaire déjà après trois ans de service).
Un des éléments essentiels à garder à l’esprit est que le décès du collaborateur met immédiatement fin aux rapports de travail. Les ayants droit selon l'art. 338 al. 2 CO ont un droit direct au « salaire » post-mortem vis-à-vis de l'employeur, « salaire » qui ne fait pas partie de la masse successorale et qui n'est pas assujetti aux assurances sociales. Il existe un ordre de priorité des ayants droit, les ayants droit de la deuxième catégorie n'entrant en ligne de compte que s'il n'y a pas d'ayants droit dans la première catégorie. En cas de pluralité d'ayants droit au sein de la même catégorie, le droit au « salaire » post-mortem doit être réparti paritairement.
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