A travaille auprès de la banque B en qualité de directeur. Sa collègue signale à l’ombudsman de l’entreprise avoir été victime d’actes de harcèlement sexuel commis par A. L’employeur lance une enquête interne puis résilie le contrat de travail de A de manière ordinaire à l’issue des investigations. Le travailleur fait opposition à son licenciement et ouvre action pour licenciement abusif, le caractère abusif du licenciement résidant selon lui dans la manière dont ce dernier a été effectué. Il n’aurait en effet pas été informé au préalable du sujet de son audition lorsqu’il a été entendu dans le cadre de l’enquête interne et n’aurait donc pas eu la possibilité de se faire accompagner par une personne de confiance comme le prévoyait une directive interne.
Ce faisant, le travailleur se fonde sur un arrêt rendu par le Tribunal fédéral en 2016, dans lequel il était indiqué qu’en cas de soupçons à l’encontre d’un travailleur, l’employeur devait mener «une enquête complète comportant, pour le travailleur dénoncé, des garanties équivalentes à celles d’une instruction pénale, telles les possibilités de préparer sa défense, se faire assister d’un conseil et faire administrer des preuves».
Le Tribunal fédéral revient ici sur sa jurisprudence en restreignant les conditions dans lesquelles un employeur peut engager sa responsabilité en cas de licenciement dans le cadre d’accusations portées à l’encontre d’un travailleur. Dans le cas d’espèce, l’employeur a, selon le TF, pris des mesures suffisantes, puisqu’il a entendu les protagonistes, consigné le tout dans un procès-verbal et donné l’occasion à l’accusé d’y apporter des modifications. En outre, la violation de la directive interne qui prévoyait le droit de se faire assister par une personne de confiance n’est pas un vice suffisamment grave pour rendre le licenciement abusif.
Selon le TF, le travailleur accusé n’a pas besoin de recevoir une description détaillée des faits reprochés, ni d’être informé au préalable du sujet de l’entretien auquel il est convoqué. Les garanties de la procédure pénale n’ont ainsi pas d’effet direct sur une relation de droit du travail, les buts et les enjeux des deux systèmes étant très différents.
Le Tribunal fédéral en conclut donc que le congé n’est pas abusif au sens de l’article 336 du Code des obligations.
(Arrêt du TF 4A_368/2023 du 19 janvier 2024)
Camille Caspary, janvier 2025